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Levier 2 - Encourager l’aménagement des temps & espaces de travail
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Faire du télétravail un accélérateur des nouveaux modes d’organisation de la mobilité

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Outre la promotion des solutions de mobilité alternatives, une stratégie de transport durable nécessite l’adoption d’une approche globale de réduction des besoins de déplacement et de lissage des heures de pointe. Au nombre des actions que les entreprises peuvent mettre en place, le télétravail, l’utilisation des outils numériques et la flexibilisation des horaires répondent à ces enjeux de gestion des besoins de mobilité.

 

Les modes d’organisation du travail, de gestion du temps et d’utilisation de l’espace ont été bouleversés ces deux dernières décennies, évoluant vers des formes plus mobiles, flexibles, connectées et collaboratives, et ce pour plusieurs raisons :

 

  • La progression de l’usage des technologies de l’information et de la communication ;
  • L’émergence de nouvelles aspirations des collaborateurs vers plus de qualité de vie ;
  • Les évolutions de la composition de la population active et de la nature des emplois ;
  • Le développement de l’offre de transport en commun (mass transit), notamment à l’extérieur de la capitale et celui de l’offre TGV rendant plus faciles les déplacements Paris/ Grande couronne voire Paris/Province.

 

La crise sanitaire a constitué indéniablement un accélérateur de ces tendances déjà bien engagées.

Pour prévenir le risque de compensation des déplacements évités par le télétravail par de nouveaux déplacements en voiture pour d’autres motifs, il faudrait :

  • S’assurer que le schéma de desserte des transports en commun et que les aménagements cyclables et piétons soient capables de capter cette demande potentielle ;
  • Maintenir et favoriser l’activité commerciale de proximité.

 

Avant la pandémie, la pratique régulière du télétravail était encore peu répandue en France. Les télétravailleurs étaient néanmoins plus représentés en Île-de-France qu’ailleurs : en 2017, 5,5 % des Franciliens avaient régulièrement recours à cette pratique (au moins un jour par semaine), contre 2,4 % en province. Lors du premier confinement en mars 2020, il s’est imposé brutalement et massivement dans divers secteurs. Le Ministère du travail estime que la pratique du télétravail a concerné 8 millions de salariés dans cette période, soit 30 % de la population active occupée en France. Environ 6 millions d’actifs l’ont découverte parfois de manière contrainte et inadaptée.

 

De nombreuses enquêtes ont mis en évidence l’essor du télétravail face aux grèves massives dans les transports en commun et aux mesures sanitaires et démontrent un engouement pour cette pratique. Il restera à confirmer sur le long terme. Pour mieux encadrer ces évolutions et sécuriser sur le long terme la pratique du télétravail, la CCI Paris Île-de-France a proposé de nouvelles adaptations du cadre réglementaire dans une récente prise de position.

 

L’Île-de-France présente des caractéristiques favorables à la mise en place des nouvelles modalités d’organisation du travail :

  • une forte concentration de sièges d’entreprises du secteur tertiaire ;
  • une proportion élevée de cadres et de professions intellectuelles supérieures (métiers particulièrement bien adaptés au télétravail) ;
  • une concentration des actifs diplômés du supérieur, notamment des jeunes ;
  • une augmentation du nombre des travailleurs indépendants ;
  • des coûts d’occupation des bureaux élevés qui inciteraient à une optimisation de l’espace utilisé.

 

Le télétravail semble constituer un levier pour réduire la congestion routière et désaturer les transports en commun aux heures de pointe. L’Apur a fait des projections sur les incidences d’un télétravail régulier (1 et 3 jours par semaine) au sein de la métropole parisienne. Trois scénarios « pour demain » ont été étudiés, en ciblant notamment les cadres : 

Quant à l’Ademe, elle a analysé les impacts durables du télétravail sur les modes de vie et sur la mobilité. Les résultats de l’enquête confirment une réduction de la mobilité dans les jours télétravaillés à domicile, tant en nombre de déplacements effectués qu’en distances parcourues :

 

  • réduction de 69 % du volume des déplacements par rapport à un jour non télétravaillé ;
  • réduction de 3,5 km parcourus sur un jour télétravaillé.

 

Une autre tendance semble avoir émergé durant la crise sanitaire : l’actif en télétravail recentrerait une partie des motifs de déplacement à proximité du lieu de résidence, favorisant les mobilités douces. Cela se confirmerait plutôt dans les zones multifonctionnelles à forte concentration de commerces, services et activités à proximité. Cette hypothèse est corroborée par les résultats des enquêtes « La mobilité au temps de la Covid-19 », réalisées par l’OMNIL avec le constat d’une hausse des déplacements à proximité du lieu de résidence et un fort recours à la marche dont la part modale a dépassé 50 %, soit +7 points en novembre-décembre 2020 par rapport à l’EGT 2018.

 

 

Mais il serait prématuré d’affirmer que le télétravail réduira effectivement les mobilités au cours de la journée/semaine. En effet, au-delà de ces impacts positifs, ces études mettent également en exergue des facteurs de risque :

 

  • L’Apur souligne dans son rapport, la forte nécessité d’équilibrer les jours de télétravail au long de la semaine, de manière à éviter un cumul de gains en termes de désaturation des réseaux sur un seul jour ouvrable.
  • Parmi les effets dits « rebond » exposés par l’Ademe, émerge le risque de voir les télétravailleurs choisir une localisation résidentielle plus éloignée de leur lieu de travail habituel, ce qui est susceptible de réduire les bénéfices environnementaux du télétravail.
  • Par ailleurs, il est craint que le temps gagné soit utilisé au profit d’autres activités. Une fois levées les mesures sanitaires, on peut s’attendre à une hausse des déplacements réalisés lors d’une journée télétravaillée pour les motifs achats, loisirs et visites. Or, ce sont justement ceux sur lesquels existe un potentiel de report modal plus marqué vers la voiture individuelle.